Nous ne sommes pas éternels,
et malheureusement, nos fins de vie ne sont pas souvent douces. Quand
la maladie nous emporte, c'est souvent une longue et difficile
agonie. Quand c'est le grand âge, il devient une constante d'être
sur-médicalisé pour contraindre une loi naturelle, cela trop
souvent au mépris du bien être d'une âme. Il est évident que
lorsque nous disposons de l'essentiel de nos facultés mentales et
plus encore physiques, il est souhaitable d'expérimenter la vie
jusqu'au bout, quelque soit son âge ou ses problèmes de santé.
Mais lorsque nous perdons progressivement nos facultés
intellectuelles du fait de maladies neuro-dégénératives, ou qu'au
contraire, nous conservons une pleine conscience de notre état, mais
restons prisonniers d'un corps en souffrance et rendu immobile, y'a
t'il de l'humanité à l'acharnement thérapeutique ?
Pour ma part, je suis
croyant en un quelque chose d'autre après la vie, et donc
l'immanence de l'âme d'une façon ou d'une autre. N'étant pas pour
autant homme qui conditionne sa pensée au travers d'un culte
quelconque, j'essaye de réfléchir à cette question sensible par
rapport à ma propre destinée. A défaut de rédiger un testament,
un livre fera tout aussi bien l'affaire et introduira ce que je
considère comme humain s'agissant de la fin de vie. Quoi qu'il
arrive, la proposition suivante du fait qu'elle est purement
sociétale, sera soumise à référendum. Il s'agirait donc
d'autoriser l'euthanasie active dans des cas bien circonscrits par la
loi.
Tout d'abord, il doit s'agir d'une volonté de la personne mourante, et pour cela, la rédaction d'un testament obligatoire simplifié (nous allons voir comment) devra permettre au personnel soignant et la famille, de connaître les dernières volontés de l'âme en partance.
Un avis médical d'un
collège de médecins et d'infirmières doit permettre dans certains
cas de faire cesser l'acharnement thérapeutique, notamment pour les
personnes devenues grabataires du fait de leur grand âge, ou les
personnes ayant subi un accident particulièrement invalidant du
point de vue cérébral, ou encore des malades arrivant à un stade
final de leur pathologie. Ce qui donnera lieu à un avis médical
positif quand à une aide médicale active ou passive à la fin de
vie, sera toujours le fait que la personne ne jouisse plus de ses
facultés mentales et exprime un mal être perceptible (crises
d'angoisse, gémissements, cris, etc) ou qu'au contraire, elle
jouisse totalement de ses facultés mentales, mais exprime son désir
de partir plus vite du fait d'une impossibilité à se mouvoir et
plus encore à communiquer normalement.
J'admets cependant que le
cas est litigieux. Bien des maladies ou des handicaps peuvent priver
des personnes de leur mobilité et leur parole, sans pour autant les
empêcher de vivre pleinement. L'exemple du physicien Stephen Hawking
en est le plus prégnant. Se poser la question pour un malade sur le
fait d'abréger sa vie terrestre est en soi aussi choquant pour la
morale publique, que difficile pour le malade. Mais aucune loi ne
peut empêcher quiconque se trouve en situation de grande souffrance
psychique ou physiologique de se poser cette question. Là où est le
tort de la loi, c'est lorsqu'une réponse heurtant la morale
publique, mais parfaitement méditée et acceptée par le malade, ne
trouve pas son action positive au travers du corps médical et plus
encore du législateur. C'est une question intime et non publique. Le
moindre des respects que l'on peut avoir pour une personne en
souffrance et sans aucune possibilité de voir son état s'améliorer,
c'est de lui laisser le choix et répondre à un désir éventuel
d'abréger ses souffrances.
Donc très clairement,
seront entendus tous les spécialistes de la fin de vie pour donner
le cadre nécessaire à un projet de loi sur l'aide positive à la
fin de vie, et le testament simplifié, comme le suivi médical du
patient sur le long terme, devront permettre de faire aboutir un
choix intime d'une personne en souffrance.
Le testament simplifié sera
un document administratif que tous les jeunes entamant leur service
civil ou militaire de trois mois, devront remplir. Il permettra
notamment de connaître leur volonté sur la question du don
d'organe, si dans les cas prévus par la loi, ils préfèrent l'aide
à la fin de vie, et enfin quel type de service funéraire ils
souhaitent. Il s'agira de simples cases à cocher.
Encore une fois, je sais que
la morale publique aura tendance à considérer qu'il peut être
choquant d'évoquer la mort, même de façon administrative à de
jeunes gens plein de vie. Mais d'une part, par définition, il est
impossible de prédire le moment où notre âme quittera notre
enveloppe charnelle, et par ailleurs, ceux qui reconnaissent penser
plus ou moins régulièrement à l'aspect éphémère de leur propre
vie, sont aussi et bien souvent les personnes qui savent le mieux
apprécier la vie. Car s'en rendre compte et l'acter, c'est aussi une
façon de ressentir pleinement ce qu'est le bonheur d'exister. Le
testament simplifié ne contraindra pas la rédaction d'un testament
plus étoffé dans les normes habituelles un peu plus tard dans la
vie de la personne.
Autre sujet que je souhaite
aborder dans cette question difficile de la fin de vie : les
normes d'inhumation. Je considère qu'il faut abroger l'article
R363-16 du code des communes qui impose la mise en bière d'un
défunt, y compris lorsqu'il s'agit de l'inhumer. La question peut
paraître un peu macabre, et pourtant, elle mérite d'être posée.
Tout d'abord, beaucoup de Français pour des questions philosophiques
ou religieuses, souhaiteraient être inhumés vêtus d'un simple
linceul. Certains le voudront d'ailleurs biodégradable. C'est d'ailleurs mon propre cas.
Or, cette loi empêche ces Français de faire respecter leurs dernières volontés autant pour des pseudos normes d'hygiène ou administratives (le cercueil dispose d'une plaque contentant certaines informations en cas d'exhumation), et j'en suis convaincu : par ce que la mort est devenu un marché. Il suffit de savoir que le coût d'un cercueil « bon marché » est d'environ 1000 €, et les entreprises de pompes funèbres ne se privent pas de mentionner « l'équipement obligatoire » pour justifier leur prix. Ainsi, le prix du cercueil brut sans les accessoires religieux ou le capiton d'une célèbre entreprise de pompes funèbres est de 856 €. Pardonnez moi de me montrer crû sur la question, mais un cercueil est un équipement dont l'usage plus que limité dans le temps, n'existe que par obligation, et cet objet ne rendra pas la vie au défunt bien qu'il puisse offrir à des familles un cérémonial que l'on peut juger digne, mais aussi extrêmement cher à un moment où l'on ne souhaiterait pas mêler la difficulté d'un deuil à des problèmes de trésorerie. D'autant qu'une jurisprudence datant du 14 mai 1992 donne un caractère alimentaire aux frais d'obsèques. Cela signifie que les frais qui peuvent être avancés par la collectivité en cas d'indigence du défunt, peuvent être réclamés ensuite aux familles. De ce fait, une loi doit permettre d'instituer dans les cotisations sociales, une infime part réservée à un minimum garanti pouvant assurer pour tous les Français, le paiement intégral des frais d'obsèques, hors services particuliers.
Pour en revenir à la
question de l'inhumation sous linceul, il y'a quelques raisons autres
qu'économiques qui pourraient intéresser le législateur en ce
sens. Premièrement d'un point de vue philosophique (en tout cas le
mien), durant des décennies, la terre nous aura nourri et maintenu
en vie, il n'est pas anormal qu'au jour de notre mort, nous puissions
lui rendre un peu de ce qu'elle nous a donné. Notre enveloppe
charnelle n'est que de la matière organique. Notre esprit est tout
autre chose.
Du point de vue plus
pragmatique, notre corps est un réservoir à phosphore et autres
éléments indispensables à la vie. En les remettant en circulation
par le biais d'un contact direct avec la terre, nous facilitons la
décomposition, autant que nous permettons à la vie de recycler
notre dépouille à la surface du sol. A noter que différents
articles de presse évoquent un problème de décomposition des corps
notamment en Allemagne, ce qui empêche l'affaissement naturel du
caveau, et donc de recouvrir un corps ancien (de parfois plus de 30
ans) par un autre défunt. De multiples raisons sont invoquées
(notamment les conservateurs que nous ingérons dans notre
alimentation), mais considérons qu'à la base, un cercueil contraint
fortement la décomposition des corps, du fait que ces derniers ne
sont pas en contact avec la terre, et que les bactéries auront vite
épuisé l'oxygène ambiant.
Une dernière raison un peu
sordide, mais qui est pourtant évidente : Puisque l'être
humain est « une ressource renouvelable », il va de
soi qu'avec un peu plus d'un demi Million de Français décédant
chaque année, il y'a une logique à faire disparaître les corps
réellement.
Si plus de 160.000 personnes choisissent la crémation, restent toujours plusieurs centaines de milliers de personnes à inhumer chaque année. Le cercueil est une boite couvrant environ 1,6 mètres carré de sol que l'on artificialise dans les cimetières. En multipliant par le nombre de défunts supplémentaires chaque année, et malgré le fait que l'on superpose dans des caveaux les corps, il devient compréhensible que nous subissons dans ce cadre un problème purement foncier. Certes, après un certain temps, et si les concessions ne sont plus louées par les familles, les ossements sont déterrés et placés dans des ossuaires. Mais je pense que l'on peut faire beaucoup plus intelligent :
Il suffit que les communes
réservent une part de leur foncier à de nouveaux cimetières. En
Scandinavie comme dans certains pays musulmans, il n'est pas rare de
voir des arbres ou arbustes plantés sur la tombe d'un défunt. Nous
pourrions tout simplement planter des forêts intelligemment et ainsi
faire d'un lieu de sépultures, un véritable foisonnement de vie.
Une plaque funéraire sous chaque arbre, et pourquoi pas un petit
texte biographique pour donner de l'intérêt à une promenade dans
un lieu ou de nombreuses histoires de vie s’entremêlent. On les
choisira les plus au sud pour faciliter la décomposition permettant
de nourrir la vie qui pousse, et de ce fait il faudra modifier
l'article R2223 du Code Général des Collectivités Territoriales,
qui suggérait une préférence pour le nord des villes, justement
pour retarder la décomposition.
Enfin quelques derniers
points notables à faire valoir. La mort ne peut être un marché. A
ce titre, la loi du 8 janvier 1993 libéralisant le marché du
funéraire, et particulièrement s'agissant des concessions sera
modifiée. La gestion des concessions redeviendra un « monopole »
réservé aux communes bien qu'il sera possible pour des acteurs
privés selon les règles en vigueur d'ouvrir des cimetières. Sera
aussi redonné aux institutions religieuses, le droit de gérer les
funérailles dans toutes leurs étapes, pour les défunts souhaitant
des obsèques religieuses. C'était autrefois la prérogative de
l'Eglise que de gérer ces questions, et une caste politique
Franc-Maçonne radicalement anti-cléricale, a souhaité au début du
siècle dernier retirer à l'Eglise ce « monopole ».
Pourtant, on ne peut pas dire que les institutions ayant vocation à
sacraliser et veiller au respect des défunts, ne sont pas
compétentes pour ce genre de « prestations de services ».
En clair, l'inhumation ou la
crémation des corps redeviendra un véritable service public, avec
pour les acteurs privés ou religieux des prix réglementés et des
normes identiques pour tous. La mort tout comme la vie, ne peut être
un « marché ».
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