samedi 1 juin 2013

Une autre législation sur la fin de vie

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Nous ne sommes pas éternels, et malheureusement, nos fins de vie ne sont pas souvent douces. Quand la maladie nous emporte, c'est souvent une longue et difficile agonie. Quand c'est le grand âge, il devient une constante d'être sur-médicalisé pour contraindre une loi naturelle, cela trop souvent au mépris du bien être d'une âme. Il est évident que lorsque nous disposons de l'essentiel de nos facultés mentales et plus encore physiques, il est souhaitable d'expérimenter la vie jusqu'au bout, quelque soit son âge ou ses problèmes de santé. Mais lorsque nous perdons progressivement nos facultés intellectuelles du fait de maladies neuro-dégénératives, ou qu'au contraire, nous conservons une pleine conscience de notre état, mais restons prisonniers d'un corps en souffrance et rendu immobile, y'a t'il de l'humanité à l'acharnement thérapeutique ?

Pour ma part, je suis croyant en un quelque chose d'autre après la vie, et donc l'immanence de l'âme d'une façon ou d'une autre. N'étant pas pour autant homme qui conditionne sa pensée au travers d'un culte quelconque, j'essaye de réfléchir à cette question sensible par rapport à ma propre destinée. A défaut de rédiger un testament, un livre fera tout aussi bien l'affaire et introduira ce que je considère comme humain s'agissant de la fin de vie. Quoi qu'il arrive, la proposition suivante du fait qu'elle est purement sociétale, sera soumise à référendum. Il s'agirait donc d'autoriser l'euthanasie active dans des cas bien circonscrits par la loi.

Tout d'abord, il doit s'agir d'une volonté de la personne mourante, et pour cela, la rédaction d'un testament obligatoire simplifié (nous allons voir comment) devra permettre au personnel soignant et la famille, de connaître les dernières volontés de l'âme en partance.

Un avis médical d'un collège de médecins et d'infirmières doit permettre dans certains cas de faire cesser l'acharnement thérapeutique, notamment pour les personnes devenues grabataires du fait de leur grand âge, ou les personnes ayant subi un accident particulièrement invalidant du point de vue cérébral, ou encore des malades arrivant à un stade final de leur pathologie. Ce qui donnera lieu à un avis médical positif quand à une aide médicale active ou passive à la fin de vie, sera toujours le fait que la personne ne jouisse plus de ses facultés mentales et exprime un mal être perceptible (crises d'angoisse, gémissements, cris, etc) ou qu'au contraire, elle jouisse totalement de ses facultés mentales, mais exprime son désir de partir plus vite du fait d'une impossibilité à se mouvoir et plus encore à communiquer normalement.

J'admets cependant que le cas est litigieux. Bien des maladies ou des handicaps peuvent priver des personnes de leur mobilité et leur parole, sans pour autant les empêcher de vivre pleinement. L'exemple du physicien Stephen Hawking en est le plus prégnant. Se poser la question pour un malade sur le fait d'abréger sa vie terrestre est en soi aussi choquant pour la morale publique, que difficile pour le malade. Mais aucune loi ne peut empêcher quiconque se trouve en situation de grande souffrance psychique ou physiologique de se poser cette question. Là où est le tort de la loi, c'est lorsqu'une réponse heurtant la morale publique, mais parfaitement méditée et acceptée par le malade, ne trouve pas son action positive au travers du corps médical et plus encore du législateur. C'est une question intime et non publique. Le moindre des respects que l'on peut avoir pour une personne en souffrance et sans aucune possibilité de voir son état s'améliorer, c'est de lui laisser le choix et répondre à un désir éventuel d'abréger ses souffrances.

Donc très clairement, seront entendus tous les spécialistes de la fin de vie pour donner le cadre nécessaire à un projet de loi sur l'aide positive à la fin de vie, et le testament simplifié, comme le suivi médical du patient sur le long terme, devront permettre de faire aboutir un choix intime d'une personne en souffrance.

Le testament simplifié sera un document administratif que tous les jeunes entamant leur service civil ou militaire de trois mois, devront remplir. Il permettra notamment de connaître leur volonté sur la question du don d'organe, si dans les cas prévus par la loi, ils préfèrent l'aide à la fin de vie, et enfin quel type de service funéraire ils souhaitent. Il s'agira de simples cases à cocher.

Encore une fois, je sais que la morale publique aura tendance à considérer qu'il peut être choquant d'évoquer la mort, même de façon administrative à de jeunes gens plein de vie. Mais d'une part, par définition, il est impossible de prédire le moment où notre âme quittera notre enveloppe charnelle, et par ailleurs, ceux qui reconnaissent penser plus ou moins régulièrement à l'aspect éphémère de leur propre vie, sont aussi et bien souvent les personnes qui savent le mieux apprécier la vie. Car s'en rendre compte et l'acter, c'est aussi une façon de ressentir pleinement ce qu'est le bonheur d'exister. Le testament simplifié ne contraindra pas la rédaction d'un testament plus étoffé dans les normes habituelles un peu plus tard dans la vie de la personne.

Autre sujet que je souhaite aborder dans cette question difficile de la fin de vie : les normes d'inhumation. Je considère qu'il faut abroger l'article R363-16 du code des communes qui impose la mise en bière d'un défunt, y compris lorsqu'il s'agit de l'inhumer. La question peut paraître un peu macabre, et pourtant, elle mérite d'être posée. Tout d'abord, beaucoup de Français pour des questions philosophiques ou religieuses, souhaiteraient être inhumés vêtus d'un simple linceul.  Certains le voudront d'ailleurs biodégradable. C'est d'ailleurs mon propre cas.

Or, cette loi empêche ces Français de faire respecter leurs dernières volontés autant pour des pseudos normes d'hygiène ou administratives (le cercueil dispose d'une plaque contentant certaines informations en cas d'exhumation), et j'en suis convaincu : par ce que la mort est devenu un marché. Il suffit de savoir que le coût d'un cercueil « bon marché » est d'environ 1000 €, et les entreprises de pompes funèbres ne se privent pas de mentionner « l'équipement  obligatoire » pour justifier leur prix. Ainsi, le prix du cercueil brut sans les accessoires religieux ou le capiton d'une célèbre entreprise de pompes funèbres est de 856 €. Pardonnez moi de me montrer crû sur la question, mais un cercueil est un équipement dont l'usage plus que limité dans le temps, n'existe que par obligation, et cet objet ne rendra pas la vie au défunt bien qu'il puisse offrir à des familles un cérémonial que l'on peut juger digne, mais aussi extrêmement cher à un moment où l'on ne souhaiterait pas mêler la difficulté d'un deuil à des problèmes de trésorerie. D'autant qu'une jurisprudence datant du 14 mai 1992 donne un caractère alimentaire aux frais d'obsèques. Cela signifie que les frais qui peuvent être avancés par la collectivité en cas d'indigence du défunt, peuvent être réclamés ensuite aux familles. De ce fait, une loi doit permettre d'instituer dans les cotisations sociales, une infime part réservée à un minimum garanti pouvant assurer pour tous les Français, le paiement intégral des frais d'obsèques, hors services particuliers.

Pour en revenir à la question de l'inhumation sous linceul, il y'a quelques raisons autres qu'économiques qui pourraient intéresser le législateur en ce sens. Premièrement d'un point de vue philosophique (en tout cas le mien), durant des décennies, la terre nous aura nourri et maintenu en vie, il n'est pas anormal qu'au jour de notre mort, nous puissions lui rendre un peu de ce qu'elle nous a donné. Notre enveloppe charnelle n'est que de la matière organique. Notre esprit est tout autre chose.

Du point de vue plus pragmatique, notre corps est un réservoir à phosphore et autres éléments indispensables à la vie. En les remettant en circulation par le biais d'un contact direct avec la terre, nous facilitons la décomposition, autant que nous permettons à la vie de recycler notre dépouille à la surface du sol. A noter que différents articles de presse évoquent un problème de décomposition des corps notamment en Allemagne, ce qui empêche l'affaissement naturel du caveau, et donc de recouvrir un corps ancien (de parfois plus de 30 ans) par un autre défunt. De multiples raisons sont invoquées (notamment les conservateurs que nous ingérons dans notre alimentation), mais considérons qu'à la base, un cercueil contraint fortement la décomposition des corps, du fait que ces derniers ne sont pas en contact avec la terre, et que les bactéries auront vite épuisé l'oxygène ambiant.

Une dernière raison un peu sordide, mais qui est pourtant évidente : Puisque l'être humain est « une ressource renouvelable », il va de soi qu'avec un peu plus d'un demi Million de Français décédant chaque année, il y'a une logique à faire disparaître les corps réellement.

Si plus de 160.000 personnes choisissent la crémation, restent toujours plusieurs centaines de milliers de personnes à inhumer chaque année. Le cercueil est une boite couvrant environ 1,6 mètres carré de sol que l'on artificialise dans les cimetières. En multipliant par le nombre de défunts supplémentaires chaque année, et malgré le fait que l'on superpose dans des caveaux les corps, il devient compréhensible que nous subissons dans ce cadre un problème purement foncier. Certes, après un certain temps, et si les concessions ne sont plus louées par les familles, les ossements sont déterrés et placés dans des ossuaires. Mais je pense que l'on peut faire beaucoup plus intelligent :

Il suffit que les communes réservent une part de leur foncier à de nouveaux cimetières. En Scandinavie comme dans certains pays musulmans, il n'est pas rare de voir des arbres ou arbustes plantés sur la tombe d'un défunt. Nous pourrions tout simplement planter des forêts intelligemment et ainsi faire d'un lieu de sépultures, un véritable foisonnement de vie. Une plaque funéraire sous chaque arbre, et pourquoi pas un petit texte biographique pour donner de l'intérêt à une promenade dans un lieu ou de nombreuses histoires de vie s’entremêlent. On les choisira les plus au sud pour faciliter la décomposition permettant de nourrir la vie qui pousse, et de ce fait il faudra modifier l'article R2223 du Code Général des Collectivités Territoriales, qui suggérait une préférence pour le nord des villes, justement pour retarder la décomposition.

Enfin quelques derniers points notables à faire valoir. La mort ne peut être un marché. A ce titre, la loi du 8 janvier 1993 libéralisant le marché du funéraire, et particulièrement s'agissant des concessions sera modifiée. La gestion des concessions redeviendra un « monopole » réservé aux communes bien qu'il sera possible pour des acteurs privés selon les règles en vigueur d'ouvrir des cimetières. Sera aussi redonné aux institutions religieuses, le droit de gérer les funérailles dans toutes leurs étapes, pour les défunts souhaitant des obsèques religieuses. C'était autrefois la prérogative de l'Eglise que de gérer ces questions, et une caste politique Franc-Maçonne radicalement anti-cléricale, a souhaité au début du siècle dernier retirer à l'Eglise ce « monopole ». Pourtant, on ne peut pas dire que les institutions ayant vocation à sacraliser et veiller au respect des défunts, ne sont pas compétentes pour ce genre de « prestations de services ».

En clair, l'inhumation ou la crémation des corps redeviendra un véritable service public, avec pour les acteurs privés ou religieux des prix réglementés et des normes identiques pour tous. La mort tout comme la vie, ne peut être un « marché ».

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